Deux expositions récentes témoignent de la modernité de Renoir : Renoir Père et fils, au Musée d’Orsay, Magritte et Renoir, à l’Orangerie où Renoir est très présent dans les collections permanentes et Paul Durand-Ruel, le pari de l’impressionnisme où l’on a pu voir des chefs-d’oeuvre rarement montrés :
Lorsque Zola, pour la première fois, fait mention de Renoir, en 1868, il le prénomme curieusement Henri. Henri, graveur en médailles, est le frère du peintre ; il exposait un Bouquet de Fleurs au Salon de 1868. Originaire de Limoges, Pierre-Auguste Renoir a appris le dessin en peignant sur porcelaine dans un atelier de la rue Vieille-du-Temple. Mais, privé de son métier par une machine à imprimer la porcelaine, il s’est reconverti dans la peinture des éventails, copiant Watteau, Lancret et Boucher pour les élégantes de son temps. Contraint d’abandonner les aimables rêveries de la peinture libertine pour de pieuses images d’une fabrique de stores saint-sulpiciens, il restera durablement marqué par le XVIII° siècle :
Les BaigneusesLa Balançoire réinterprète de manière sagement bourgeoise Les Hasards Heureux de l’Escarpolette de Fragonard et les grandes Baigneuses de la dernière période se souviennent à l’évidence des tendresses précoces du peintre pour celles de Boucher. Quant à Lise, qu’il présente au Salon de 1868, elle garde quelque chose des belles promeneuses des Fêtes Galantes… Admis aux Beaux-Arts en 1862, Renoir travaille dans l’atelier de Gleyre où il rencontre Monet, Sisley et Bazille, avec lesquels il peint sur le motif en forêt de Fontainebleau en 1863 ; fréquemment associé à Monet, avec lequel il peindra La Grenouillère en 1869 ou Le Pont-Neuf en 1872, il partage aussi son goût des « parisiennes » ; aussi Zola a-t-il raison de dire que sa Lise est la « sœur » de Camille (La Robe Verte).
Renoir, Diane Chasseresse ; Monet, Camille et Renoir, Portrait de Lise à l’ombrelleRefusé au Salon de 1866 avec un Paysage avec deux figures et en 1867 avec sa Diane Chasseresse, il y rentre en 1868 avec Portrait de Lise à l’ombrelle. La toile, qui étudie déjà la gamme des blancs chère aux futurs impressionnistes, emporte l’estime du public éclairé. Mais cet intérêt pour une œuvre audacieuse irrite les gardiens du temple : « parce que Lise avait du succès, regardée qu’elle était et discutée par quelques connaisseurs, révèle Castagnary, à la révision, on l’a portée au dépotoir dans les combles, à côté de La Famille de Bazille, non loin des grands Navires de Monet. » Comme lui, Zola encourage ces « actualistes » dont les « œuvres sont vivantes, parce qu’ils les ont prises dans la vie et qu’ils les ont peintes avec tout l’amour qu’ils éprouvent pour les sujets modernes ». |
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L’autre tableau dont je désire parler, est celui qu’Henri Renoir a intitulé Lise et qui représente une jeune femme en robe blanche, s’abritant sous une ombrelle. Cette Lise me paraît être la sœur de la Camille de Claude Monet. Elle se présente de face, débouchant d’une allée, balançant son corps souple, attiédi par l’après-midi brûlante. C’est une de nos femmes, une de nos maîtresses plutôt, peinte avec une grande vérité et une recherche heureuse du côté moderne.
Mon Salon – Les actualistes 1868 |
à suivre
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