Schoenewerk (Alexandre) 1820-1885

Alexandre Schoenewerk appartient au courant majeur de la sculpture de la fin du XIX° siècle que fut l’éclectisme : fait d’emprunts à tous les temps et à tous les peuples, l’éclectisme révèle la volonté de puissance d’une bourgeoisie qui veut s’approprier le monde par la représentation. Florissant sous le Second Empire, il continue à faire la joie des parvenus sous la Troisième République et Zola, qui fustige l’éclectisme dans La Curée, n’épargne pas Schoenewerk dans ses Ecrits sur l’art.

On doit à Schoenewerk des Psychédes jeunes filles à la fontaine et des allégories comme l’allégorie de l’Europe que l’on peut voir sur le parvis du Musée d’Orsay.

Puisant aux sources d’une antiquité dont les fouilles archéologiques de Pompéi et d’Herculanum renouvelaient la connaissance, Alexandre Schoenewerk respecte les préceptes académiques : La Jeune Tarentinepar exemple, se veut la traduction plastique d’un texte littéraire. C’est à un poème d’André Chénier, lui-même inspiré des sources antiques (1), que le sculpteur emprunte le sujet de cette oeuvre de 1871 qui fut présentée et acquise par l’Etat au Salon de 1872. Mais, comme La Femme piquée par un serpent d’Auguste Clésinger, La Jeune Tarentine évoque aussi le thème romantique des noces tragiques de l’amour et de la mort. On y retrouve enfin la pose lascive des belles de la mythologie revisitées par les artistes académistes : La Vénus de Cabanel, La Bacchante couchée de Moreau-Vauthier ont cette torsion de tout le corps qui évoque le spasme du plaisir féminin sous couvert d’idéal antique. Zola ironise sur cette dans son compte-rendu du Salon de 1872 :

A côté, il y a une pâmoison de marbre que le public attendri entoure avec recueillement. C’est La Jeune Tarentine, de M. Schoenewerk. Voilà qui est délicat. L’artiste a couché sur un roc cette amante dont nous parle André Chénier, qui allait à l’amour et qui ne rencontra que la mort ; la vague ne roule que son cadavre sur la rive, où l’attendait le bien-aimé.
La hanche haute, la tête renversée, la face déjà amollie et comme effacée par l’eau, le cadavre se dissout d’une façon toute tendre et toute poétique ; il est mûr pour quelque morgue de l’idéal. Les dames en soie grise et les messieurs décorés sont charmés de cette délicatesse dans la putréfaction.

 

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