Les Sarcleuses (1860)
Comblé de médailles et d’honneurs, Jules Breton est l’un des peintres fétiches du Second Empire et de la Troisième République. Loin des audaces de Courbet ou même de Millet, il présente une image idéalisée du monde paysan, héritée du romantisme socialiste de 1848, qui plaît aux tenants d’un « réalisme moral ». Zola ne lui pardonne ni son opposition farouche à Manet, qu’il a refusé au Salon de 1866, ni ses bergères « élégiaques » : on jugera de son style avec Les Sarcleuses (1860) et la Paysanne tricotant (Salon de 1873) du Metropolitan Museum de New York ou encore par La Vendange à Château Lagrange du Joslyn Art Museum ou par la Bretonne de 1872 (CGFA).
La Vendange à Château Lagrange et la Bretonne
Jules Breton, La Plantation du Calvaire
Le romancier se souviendra dans L’Œuvre de quelques-unes de ses toiles les plus grandiloquentes comme Le Rappel des Glaneuses, La bénédiction des Blés en Artois et La Plantation du Calvaire pour imaginer les toiles du réaliste sur le déclin qu’est Bongrand. |
M. Breton […] est un peintre jeune et militant. Il se serait écrié, en face des toiles de M. Manet : « Si nous recevons cela, nous sommes perdus. » Qui ? nous ? …. M. Breton en est aux paysannes qui ont lu Lélia et qui font des vers le soir, en regardant la lune. On parle, de par le monde, de la noblesse de ses figures. Ainsi tient-il à ne pas laisser entrer un seul paysan vrai au Salon. Cette année, il en a gardé l’entrée, et il a mis impitoyablement à la porte tout ce qui exhalait la puissante odeur de la terre.
Mon Salon 1866
Dans une revue de l’école de peinture française moderne, on ne saurait exclure Jules Breton du nombre des peintres qu’il faut prendre en considération. […] Jules Breton, de son côté, s’est acquis une célébrité en peignant des paysannes idéales. Il faut voir au Champ-de-Mars les beautés qu’il habille de toile grossière et qui ont l’allure de déesses.
La foule approuve et appelle cela « avoir du style ». Mais c’est du mensonge tout court et rien de plus. J’aime mieux les paysannes de Courbet, non seulement parce qu’elles sont mieux dessinées du point de vue technique, mais aussi parce qu’elles sont plus proches de la réalité. Remarquez que Jules Breton est comblé de faveurs depuis 1855, abreuvé d’une pluie de médailles et de croix, tandis que Courbet, encore une fois, est mort en exil, poursuivi par les huissiers que le gouvernement français avait lancés sur ses traces.
Lettres de Paris : L’ école française de peinture à l’exposition de 1878
M. Jules Breton […] est un naturaliste de la veille, mais un naturaliste tout confit en poésie. Il a cette année encore au Salon une de ces scènes champêtres dont les paysannes ont l’air de déesses déguisées. C’est d’un sentiment très large, si l’on veut ; mais nous sommes ici dans un poème, et non dans la réalité. M. Jules Breton, qui est un peintre creux, me fait toujours regretter Courbet.
Le Naturalisme au Salon 1880
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